Charles de Foucauld ou la fraternité au coeur
Rien ne semblait prédisposer Charles de Foucauld (1858-1916) à faire de la fraternité un trait dominant de sa vie… Aristocrate, il est engagé à 22 ans, jeune officier, dans la conquête de l'Algérie. Naît alors en lui une grande passion pour le monde arabe, qui le conduit à être le premier explorateur du sud-ouest marocain, alors interdit aux Européens.
Sa conversion à la foi catholique, à 28 ans, change radicalement le cours de sa vie. Devenu prêtre – après 7 ans de vie monastique – il choisit de s'établir en Algérie, à proximité et des militaires français dont il reste l'ami et des indigènes (arabes, juifs et noirs descendants d'esclaves). Après 4 ans dans l'oasis de Beni Abbès, près du Maroc, il passe les 11 dernières années de sa vie au coeur du désert du Sahara, parmi les tribus nomades à Tamanrasset.
Seul européen au milieu des Touaregs musulmans, il apprend à les connaître, il étudie leur langue de manière très savante pour préparer le terrain à de futurs missionnaires ; il se fait abordable à tous. Son apostolat n'est pas celui de la prédication, mais de la bonté ; il cherche à gagner leur confiance, au point de leur devoir la vie sauve quand, un jour, la maladie et le découragement le terrassent. Il meurt à 58 ans, victime d'un groupe que la guerre a soulevé contre la France.
A cause de Jésus, aimé par-dessus tout, il voulait habituer tous les habitants, chrétiens, musulmans et juifs, à le regarder comme leur frère, écrit-il. « Il a fait un chemin de transformation jusqu'à se sentir le frère de tous », écrit le pape François. Pour cela, « il a orienté le désir du don total de sa personne à Dieu vers l'identification avec les derniers, les
abandonnés, au fond du désert. »
Alors que le conflit des mémoires n'est pas terminé entre français et algériens, la figure de Charles de Foucauld apparaît comme prophétique d'une fraternité capable de dépasser les
identités nationales et religieuses. A l'heure où, un peu partout, les étrangers sont perçus comme une menace par une partie de la population, y compris catholique, n'avons-nous pas besoin d'une telle figure pour comprendre que la fraternité est notre meilleur avenir ?
En le proclamant saint le 15 mai, le pape le donne en exemple à toute l'Eglise. « Que Dieu inspire ce rêve de fraternité à chacun de nous ! »
René-Claude GUIBERT, prêtre auxiliaire
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